Dans la grande majorité, les tuteurs d’un enfant mineur sont ses parents. Malheureusement, lorsqu’un évènement survient qui fait en sorte que les parents ne peuvent plus assumer ce rôle de tuteur, d’autres personnes peuvent devenir tuteurs de l’enfant. La tutelle supplétive est donc une alternative pour les parents qui ne sont plus en mesure d’exercer leurs charges parentales et titulaires.
En 2017, le législateur québécois a introduit un nouveau type de tutelle de mineur en ajoutant neuf nouvelles dispositions législatives au Code civil du Québec. Ce nouveau régime vient répondre de façon plus adéquate aux enjeux modernes de droit de la famille, tout en tenant compte de l’intérêt supérieur de l’enfant.
JuriGo vous présente donc tout ce qu’il faut savoir le régime de la tutelle supplétive en droit de la famille québécois!
Quels sont les différents types de tutelle au mineur ?
La loi prévoit trois types de tutelle au mineur : la tutelle légale, la tutelle dative et la tutelle supplétive.
La tutelle légale : Il s’agit de la tutelle qui revient automatiquement aux parents. Bien évidemment, les parents n’ont pas de démarches à faire auprès d’un tribunal afin d’être reconnus comme tuteurs légaux de l’enfant. Au décès de l’un des parents, la tutelle est assumée exclusivement par l’autre parent. En règle générale, la tutelle légale des parents n’est pas rémunérée, sauf dans les cas où la gestion des biens du mineurs est l’occupation principale des parents.
La tutelle dative : Si les deux parents décèdent, s’ils deviennent inaptes ou s’ils sont tous deux déchus de leur autorité parentale, un tuteur datif sera nominé. Généralement, la tutelle dative est exercée par un membre de la famille de l’enfant ou par un proche. Lorsqu’aucun proche du mineur ne peut exercer la tâche de tutelle dative, celle-ci sera exercée par le Directeur de la protection de la jeunesse ou par le Curateur public. Les parents peuvent désigner un tuteur datif par testament, par mandat de protection ou par déclaration au Curateur public. Le mineur peut avoir plus d’un tuteur datif : un tuteur « à la personne » et un ou plusieurs tuteurs « aux biens ».
Qu’est-ce que la tutelle supplétive ?
La tutelle supplétive consiste en la désignation, soit par la mère ou le père de l’enfant, d’une personne à qui le parent délègue ou bien partage ses charges de tuteur légal et de titulaire de l’autorité parentale, en d’autres mots, ses charges tutélaires et parentales. Ces charges représentent les obligations auxquelles sont tenus les tuteurs légaux et les titulaires de l’autorité parentale, par exemple le devoir de protection de l’enfant, de l’administration de son patrimoine et le droit et le devoir de garde, de surveillance et d’éducation de l’enfant,
Pour exercer la tutelle supplétive, il faut que le parent de l’enfant concerné soit dans l’impossibilité d’exercer pleinement les charges de tuteur légal et de titulaire de l’autorité parentale. Cette impossibilité peut être en lien à plusieurs situations, par exemple lorsque le parent doit s’absenter du pays pour plusieurs années afin de travailler, ou lorsque l’un des parents est déchu de l’autorité parentale .
Est-ce que tout membre de la famille ou proche de l’enfant peut être désigné comme tuteur supplétif ?
La réponse est non! Seul certaines personnes qui font partie de la famille élargie de l’enfant peuvent être ainsi nommées comme tuteurs. Il importe de noter que ces personnes sont les mêmes personnes qui peuvent bénéficier du régime de l’adoption sur consentement spécial. En voici une liste :
- Le père, la mère, un grand-parent ou un arrière grand-parent de l’enfant ;
- Le ou la conjoint(e) du père, de la mère, du grand-parent ou de l’arrière grand-parent de l’enfant ;
- L’oncle, la tante, le frère majeur ou la sœur majeure de l’enfant ;
- Le ou la conjoint(e) de l’oncle, de la tante, du frère majeur ou de la sœur majeure de l’Enfant.
Comme vous pouvez le constater, la tutelle supplétive permet donc à un membre de la famille élargie de l’enfant d’agir presque totalement comme le ferait un parent, avec les mêmes droits et devoirs légaux et les responsabilités qui en découlent.
Les avantages de la tutelle supplétive : quelques exemples
Tout d’abord, la tutelle supplétive fait en sorte qu’il y a suspension des charges tutélaires et parentales du parent qui a délégué celles-ci et qui n’est plus en mesure de les exercer pleinement. Le tuteur supplétif va donc exercer les charges dont le parent bénéficiait auparavant. Il importe de savoir que s’il s’agit d’un partage des charges tutélaires, le principe sera le même, mais dans la mesure du partage établi. Ainsi, s’il y a eu délégation de l’ensemble des charges (et non d’un simple partage), le tuteur supplétif va également exercer l’autorité parentale à l’égard de l’enfant.
Il est donc important de distinguer la tutelle supplétive de la possibilité, pour un parent, de déléguer la garde, la surveillance ou l’éducation de l’enfant de manière révocable, spéciale et temporaire tel que prévu à l’article 601 C.c.Q. La tutelle supplétive, elle, engendre la suspension des charges du parent délégataire. Par exemple, le fait d’embaucher une gardienne pour quelques heures par semaine ne constitue pas une tutelle supplétive, mais simplement une délégation temporaire de la garde de l’enfant.
La tutelle supplétive représente une alternative intéressante à l’adoption, surtout dans certaines circonstances particulières. Par exemple, on peut penser à l’exemple du grand-parent qui veut adopter son petit-enfant afin de pouvoir s’occuper de ce dernier tel que l’auraient fait les parents. Dans ce cas-ci, l’adoption sur consentement spécial serait une option possible sur le plan légal, mais une telle adoption risque d’avoir des conséquences identitaires et symboliques sur l’enfant, puisque ce dernier deviendrait légalement le frère de l’un de ses parents. La tutelle supplétive permet d’éviter une telle situation : il serait peut-être ici préférable d’opter pour la tutelle supplétive afin de permettre que le grand-parent en question puisse jouir des mêmes charges tutélaires et parentales qu’un parent, sans pour autant devenir le père ou la mère de son petit-enfant.
Un autre exemple commun est celui du beau-parent qui souhaiterait bénéficier des charges tutélaires et parentales à l’égard de l’enfant de son ou sa conjoint(e). Quoique l’adoption sur consentement spécial soit également ouverte au beau-parent, il se peut qu’il ne s’agisse pas de la solution idéale parce que celle-ci aura la conséquence d’effacer la filiation précédente du mineur avec son autre parent. La tutelle supplétive permettrait ici au beau-parent d’exercer les charges généralement reconnues au parent de l’enfant, sans toutefois effacer la filiation de l’enfant avec son père ou sa mère biologique.
Qui doit consentir à la désignation du tuteur supplétif ?
La désignation d’un individu comme tuteur supplétif de l’enfant doit impérativement être autorisée par le tribunal, à la demande de l’un des parents de l’enfant. Si la demande est une demande en partage des charges parentales et tutélaires par l’un des parents ou de délégation totale de ces charges par l’un des parents, le consentement des deux parents sera requis.
De plus, si l’enfant est âgé de 10 ans ou plus, il doit obligatoirement être avisé de la demande et la désignation ne peut avoir lieu sans consentement, sauf dans les cas où l’enfant n’est pas en mesure de manifester sa volonté. Comme dans toute décision en matière familiale impliquant un enfant, le tribunal devra tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans sa prise de décision sur la désignation du tuteur supplétif. Si son âge et son discernement le permettent, l’enfant pourra être entendu par le tribunal.
Un tribunal peut donc autoriser la désignation s’il juge que celle-ci serait dans l’intérêt supérieur de l’enfant, malgré le refus de ce dernier. Par la même logique, il peut aussi autoriser la désignation, malgré le fait que l’un des parents s’y oppose. Cependant, le tribunal ne peut pas écarter le refus d’un enfant âgé de 14 ans et plus et il doit respecter sa volonté.
Enfin, si l’enfant concerné par la demande fait l’objet d’un signalement auprès du Directeur de la protection et de la jeunesse (DPJ), la demande de désignation doit lui être notifiée et le DPJ peut intervenir de plein droit à cette demande.
Qui peut s’opposer à la désignation d’un tuteur supplétif ?
En plus des personnes qui doivent donner leur consentement ou qui peuvent s’opposer à une demande de désignation, toute personne intéressée peut contester la délégation ou le partage des charges ainsi que la désignation du tuteur. La personne intéressée est une personne qui a un intérêt moral suffisant envers l’enfant, par exemple son oncle ou sa tante, ses grands-parents ou bien un autre membre de sa famille élargie.
Quels sont les effets de la tutelle supplétive ?
Les effets de la tutelle supplétive ne sont pas nécessairement permanents. Le parent qui a consenti à la délégation des charges tutélaires et parentales peut s’adresser au tribunal afin qu’on rétablisse ses charges, si des faits nouveaux le justifient. Ces faits nouveaux doivent justifier la fin de l’impossibilité du plein exercice des charges tutélaires et parentales. L’enfant âgé de 10 ans et plus ou bien le tuteur de l’enfant peut également déposer une telle demande.
Le tuteur supplétif a également la possibilité de s’adresser au tribunal afin de remettre sa démission et demander d’être libéré des charges qui lui incombent. Il devra alors rendre compte de sa gestion et aviser de sa demande les parents de l’enfant et l’enfant, si celui-ci est âgé de 10 ans et plus.
La tutelle pourrait également prendre fin lors de l’application des règles de la tutelle, que le tuteur soit nommé par les parents de l’enfant ou bien par le tribunal. Finalement, la tutelle supplétive prend fin lorsque l’enfant atteint l’âge de la majorité.
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L’intérêt supérieur de l’enfant, tel que ce principe est consacré dans le droit de la famille québécois, devrait toujours être au cœur de toute décision affectant un enfant. Ainsi, que vous soyez le parent d’un enfant ou bien l’un des membres de sa famille, il se peut que pour une raison ou une autre, vous ayez à avoir recours au régime de la tutelle supplétive.
La tutelle supplétive représente plusieurs avantages, parce qu’elle permet au tuteur de bénéficier des mêmes prérogatives reconnues au parent de l’enfant, sans nécessairement avoir les effets permanents et symboliques de l’adoption.
Dans tous les cas, il est recommandé d’obtenir les conseils d’un avocat spécialisé en droit de la famille ou en droit de la jeunesse afin que celui-ci vous fasse part de la solution la plus adaptée à votre situation et à celle de l’enfant concerné. Ce juriste peut également vous représenter devant le tribunal afin de faire valoir vos prétentions devant une partie qui s’opposerait à vos démarches.
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