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Prendre des décisions concernant un enfant dans son meilleur intérêt est l'une des responsabilités les plus cruciales d'un parent.
Cependant, par moments, cette intention bienveillante peut être altérée par des erreurs de jugement. En effet, il existe des situations où un parent ou un tuteur, par inadvertance ou autrement, peut agir de manière à compromettre le bien-être de leur adolescent.
Face à de telles situations, la loi québécoise prévoit un recours pour l'adolescent : l'émancipation. Cette démarche juridique permet à un adolescent de devenir légalement indépendant de ses parents ou tuteurs, prenant ainsi en main sa propre vie et ses choix.
Effectivement, l’émancipation peut offrir une voie vers l'autonomie pour un adolescent dont le meilleur intérêt a été compromis.
L'émancipation est un choix à considérer lorsque l'adolescent peut démontrer sa capacité à assumer des responsabilités et à prendre des décisions matures pour lui-même.
Cependant, l'émancipation n'est pas une décision à prendre à la légère. Elle comporte plusieurs implications légales, et le tribunal évaluera minutieusement la situation avant d'accorder une telle demande.
Qu’est-ce que l’émancipation d’un mineur ?
L'émancipation est un acte juridique par lequel un mineur obtient la capacité d'exercer plusieurs droits et responsabilités habituellement réservés aux majeurs.
L’émancipation confère au mineur une autonomie, l'autorisant à prendre des décisions juridiques et financières sans l'approbation parentale. Un mineur peut acquérir une simple émancipation ou une pleine émancipation.
Simple émancipation
La simple émancipation donne à l'adolescent plusieurs droits, tout en évitant qu'il soit reconnu comme un adulte à part entière. La simple émancipation permet à l'adolescent de prendre en charge certaines responsabilités juridiques et financières tout en conservant sa condition de mineur, offrant ainsi une forme d'autonomie intermédiaire entre la minorité et la majorité légale.
Le mineur émancipé peut faire tous les actes de simple administration!
Exercices des droits civils du mineur
L'émancipation ne signifie pas une rupture complète avec la minorité ni une acquisition immédiate de tous les droits afférents à la majorité. Cependant, le mineur émancipé n’a plus l'obligation d'être représenté pour son parent ou tuteur pour l’exercice de certains droits civils.
Suite à la simple émancipation, le mineur n’a pas besoin de l’approbation de son parent ou tuteur pour accomplir les actes suivants:
- Signer un contrat de location de courte durée (3 ans maximum)
- Faire des dons de biens dans la limite de ses capacités financières
- Accepter une offre d'emploi
Autonomie résidentielle
L'un des pivots de l'émancipation est que le mineur peut désormais fixer son propre domicile. Le mineur émancipé se détache de l'autorité de ses parents. Cette autonomie résidentielle reflète la capacité du mineur émancipé à mener une vie indépendamment des directives parentales.
1.3 Limites de la simple émancipation
Il est à noter que la simple émancipation comporte plusieurs limites. En effet, le mineur émancipé doit être assisté de son tuteur pour tous les actes excédant la simple administration, notamment :
- L'acceptation de donations assorties de conditions (par exemple recevoir une maison en donation, mais qui vient avec la condition de faire réparer la toiture)
- La renonciation à une succession
De plus, certains actes juridiques impliquant de grosses sommes d’argent ou des transactions importantes doivent être autorisés par un tribunal, tels que :
- Des prêts
- Des emprunts considérables
- Les actes d’aliénation d’un immeuble ou d'une entreprise
L'importance de cette assistance découle de la nécessité de protéger l'intérêt et la sécurité du mineur émancipé dans des domaines plus complexes et potentiellement risqués.
En effet, cela garantit que les intérêts du mineur ne sont pas compromis et que toute décision prise soit évaluée en vue de garantir son bien-être et sa sécurité.
1.4 Les actes juridiques effectués par le mineur émancipé ne peuvent être annulés sans préjudice!
En vertu de l’article 173, alinéa 2 et de l’article 174 du Code civil du Québec « L’acte accompli sans assistance ne peut être annulé ou les obligations qui en découlent réduites que si le mineur en subit un préjudice. »
Alors, seul le mineur subissant un préjudice peut demander l'annulation ou la réduction des obligations découlant d'un acte juridique qu'il a réalisé sans assistance. En d'autres termes, la nullité ou la réduction n'est possible que lorsque le mineur est lésé par les conséquences de cet acte.
Prenons l’exemple d’un mineur émancipé qui contracte une dette importante sans considérer sa capacité de remboursement, ce qui le met en difficulté financière. Il pourrait demander l'annulation ou la réduction des obligations découlant du contrat en démontrant que le préjudice financier provient de sa décision prise sans conseil ou assistance.
Ainsi, la loi québécoise protège les intérêts du mineur en s'assurant qu'il ne subisse pas de désavantage injuste ou indu. Cette mesure vise à garantir que les choix faits par le mineur, en l'absence de supervision, ne lui portent pas préjudice et qu'il ne soit pas désavantagé en raison de son manque de connaissance des conséquences éventuelles.
1.5 Comment obtenir une simple émancipation?
La simple émancipation du mineur peut s’obtenir de deux façons :
- Par le dépôt d'une déclaration auprès du Curateur public
- Par une demande au tribunal.
Déclaration au Curateur public: collaboration et consentement
Un mineur peut obtenir la simple émancipation en déposant une déclaration auprès du Curateur public. Cependant, cette démarche requiert que l'adolescent ait l'âge de 16 ou 17 ans, et que son tuteur approuve la demande d'émancipation. Cette approbation du tuteur est nécessaire pour déposer la déclaration d'émancipation auprès du Curateur public .
Cette déclaration doit comporter une demande écrite formulée par l'adolescent lui-même, accompagnée de l'accord du tuteur. Le cas échéant, la déclaration doit également inclure l'approbation du conseil de tutelle.
Le conseil de tutelle est un groupe normalement formé de personnes proche de l’adolescent. Ce conseil assure la surveillance du tuteur lorsque celui-ci n'est pas le parent de l'adolescent ou lorsque l’adolescent détient des biens évalués à 40 000$ ou plus.
Demande au Tribunal: Recours en Cas de Désaccord
L'adolescent âgé de 16 ou 17 ans voulant être émancipé a également la possibilité de déposer personnellement une demande de simple émancipation devant le tribunal, notamment lorsque le tuteur ne soutient pas sa démarche. Dans ce cas, le juge examinera les motifs de la demande et évaluera si elle correspond à l'intérêt supérieur de l'adolescent.
Il est essentiel de noter que bien que la règle générale exige que l'adolescent ait généralement 16 ou 17 ans, la loi québécoise ne prévoit pas un âge minimal pour obtenir la simple émancipation.
À titre d'exemple, les tribunaux québécois ont accordé à plusieurs reprises la simple émancipation à des adolescents âgés de 15 ans.
Le juge rendra sa décision en tenant compte de l'opinion du tuteur et en considérant l'avis du conseil de tutelle. De plus, le juge devra évaluer toutes les circonstances et les facteurs pertinents afin que la décision prise garantie le bien-être de l’adolescent.
Il est à noter que les tribunaux québécois ont affirmé à plusieurs reprises que l'émancipation doit servir à « résoudre au minimum un enjeu substantiel lié à la vulnérabilité de l'adolescent et, idéalement, à mettre un terme total à cette vulnérabilité. »
En autres mots, l’émancipation doit offrir une solution aux situations où l'adolescent fait face à des difficultés significatives ou à des risques en raison de son statut minoritaire. L'émancipation est avant tout destinée à améliorer la situation de l'adolescent.
La pleine émancipation
Contrairement à la simple émancipation, la pleine émancipation confère au mineur la capacité d'exercer ses droits civils de la même manière qu'un adulte. Cette mesure lui permet de prendre des décisions légales et de s'engager dans des actes juridiques avec une autonomie similaire à celle d'un individu majeur.
2.1 Les effets de la pleine émancipation
La pleine émancipation confère à l'adolescent la liberté de se libérer de l'autorité parentale ou tutélaire. En outre, elle donne à l'adolescent une capacité juridique complète, lui permettant ainsi de jouir des droits civils et des obligations normalement réservés aux adultes.
Entre autres, le mineur pleinement émancipé a la possibilité :
- De réclamer une pension alimentaire de ses parents
- De rédiger son testament
- De conclure tous types des baux
- D'acheter un immeuble
- De vendre un immeuble
- De contracter une hypothèque
2.2 Les limites de la pleine émancipation
Cependant, il est important de noter que la pleine émancipation n’a effet que sur l’exercice des droits civils québécois, elle n'a dont aucune incidence sur les droits accordés en vertu d'autres lois.
Un adolescent émancipé conserve certaines limitations malgré son statut. Par exemple, il ne peut pas exercer le droit de vote, acheter des cigarettes et de l’alcool ou fréquenter des bars.
De plus, bien qu'émancipé, s'il venait à commettre un acte criminel, il ne serait pas jugé devant un tribunal pour adultes, mais plutôt devant un tribunal pour mineurs. En effet, le mineur émancipé est soumis aux lois et aux procédures applicables aux jeunes délinquants .
2.3 Comment obtenir une pleine émancipation?
La pleine émancipation d'un mineur peut s’obtenir de deux façons :
- Par le mariage
- Par une demande au tribunal
De manière similaire à la simple émancipation, la pleine émancipation peut aussi être obtenue par le mineur en sollicitant le tribunal, pour des motifs sérieux. Lorsqu'une demande de pleine émancipation est soumise à un juge, celui-ci examinera les motifs de la demande et évaluera si la pleine émancipation est nécessaire ou si la simple émancipation est suffisante.
En effet, lorsque le tribunal détermine que la simple émancipation ne résoudra pas entièrement les problèmes de l'adolescent, il peut accorder la pleine émancipation. Cette mesure est prise lorsque le tribunal est convaincu que les circonstances requièrent une pleine émancipation pour répondre adéquatement aux besoins et aux défis spécifiques auxquels l'adolescent est confronté.
Lorsque la pleine émancipation est demandée au tribunal, l'avis du détenteur de l'autorité parentale, du tuteur ainsi que de toute personne ayant la charge du mineur est requis. De plus, le conseil de tutelle peut être consulté dans ce processus.
2.4 Exemples nécessitant la pleine émancipation :
- L’adolescent devenant parent
Prenons le cas d’une adolescente de 16 ans enceinte, désirant assumer l'autorité parentale de son enfant à naître. La simple émancipation ne serait pas suffisante pour répondre à sa situation. Dans ce contexte, le tribunal va considérer la demande de pleine émancipation justifiée.
En effet, la pleine émancipation de l’adolescente est nécessaire pour lui permettre de prendre des décisions autonomes et d’assumer entièrement les responsabilités parentales à venir.
- L’adolescent voulant bénéficier de prestations d'aide sociale
La décision J.D.Du. c. M.O., rendue par la Cour supérieure du Québec, accorde la pleine émancipation à une adolescente de 15 ans pour des raisons financières. Cette affaire concerne une situation où les parents de la jeune fille sont décédés, la laissant sans héritage et sans soutien financier.
Étant donné qu'une personne doit être majeure pour bénéficier de prestations d'aide sociale, il a été établi que l'adolescente, bien qu'encore mineure, démontrait une maturité suffisante pour être autonome avec l’aide d’un appui financier. En conséquence, le juge a conclu qu'il existait un motif sérieux justifiant l'accord de la pleine émancipation.
Les adolescents ont le droit à l’aide juridique pour leur demande d’émancipation!
Il est essentiel de noter que les personnes en dessous de l'âge de 18 ans sont automatiquement éligibles à l'aide juridique . Par conséquent, les adolescents ont la possibilité d'être représentés par un avocat dans le cadre de leur demande d'émancipation.
L'opportunité de recourir aux services d'un avocat grâce à l'aide juridique constitue une source de protection et de soutien pour les adolescents qui désirent obtenir leur indépendance légale.
Cela assure que leurs droits et intérêts soient préservés au cours des démarches judiciaires associées à l'émancipation, garantissant ainsi une représentation appropriée de leurs besoins et objectifs.
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