La perte d’un être cher est assez difficile, mais elle peut aussi engendrer de nombreux questionnements relatifs à la dévolution de la succession. Par exemple, que se passe-t-il si vous apprenez que vous avez été déshérité par le défunt? Peut-être que le défunt vous avait fait croire que vous hériteriez de certains biens, ou bien vous comptiez sur la succession pour subvenir à vos besoins…
Au Québec, la loi prévoit la notion de liberté absolue de tester de toute personne capable. Ainsi, le testateur peut décider librement à qui il souhaite léguer ses biens, tant qu’il agit dans les limites prévues par la loi. Il est également tenu par les obligations qu’il contracte et il ne peut pas abuser ou enrichir sa succession au détriment d’autrui.
Ainsi, même si vous êtes un proche du défunt et que vous avez été déshérité en partie ou en totalité, vous avez des recours à exercer contre une succession! Avant de conclure que vous avez été déshérité, vous devriez tout de même vous assurer que le testament en question est bel et bien valide. Il est fortement recommandé de consulter un avocat en droit des successions afin de déterminer si c’est le cas.
Est-ce que le décès du défunt a pour effet de libérer la succession de ses obligations alimentaires envers ses enfants, son conjoint ou son ex-conjoint?
La réponse est non! Le Code civil du Québec prévoit que le défunt ne peut soustraire sa succession à ses obligations alimentaires. Les recours relatifs aux obligations alimentaires doivent cependant être exercés dans un délai de six mois suite au décès.
L’obligation alimentaire est effectivement une institution primordiale du droit de la famille, parce qu’elle peut impliquer un enfant en bas âge qui devra bénéficier de la pension alimentaire pour couvrir ses besoins pour une longue période, ou bien un conjoint marié ou uni civilement qu’est pas autonome financièrement.
Toutefois, la loi impose un plafond à la contribution alimentaire qui peut être accordée à l’enfant du défunt ou à son conjoint marié ou uni civilement : cette contribution ne peut pas aller au-delà de la moitié de la part à laquelle il aurait pu prétendre en vertu des règles de la succession ab intestat (sans testament).
Par exemple, disons que le défunt meurt en laissant derrière lui un nouveau conjoint marié et un enfant, d’une union précédente, qu’il a déshérité. Sa succession vaut 150 000$. L’enfant du défunt, même s’il est déshérité, pourra réclamer à la succession une pension alimentaire jusqu’à un maximum (un plafond) de 50 000$. Cela s’explique parce que si la succession du défunt avait été ab intestat, son enfant aurait pu prétendre à une part de 2/3 de la succession. Ainsi, la moitié des 2/3 de la succession correspond à une somme de 50 000$.
Il est donc possible de conclure qu’il existe une sorte de limite à la volonté du testateur lorsqu’il est question d’obligation alimentaire envers un enfant ou un conjoint marié ou uni civilement : 50% d’une certaine part de la succession peut être attribuée contre la volonté du testateur.
Enfin, il importe de noter que la réclamation de l’ex-conjoint séparé ou divorcé est régie par des règles différentes. La réclamation alimentaire de l’ex-conjoint se limite à 12 mois et celles des autres créanciers alimentaires à 6 mois, le tout jusqu’à un maximum de 10% de la valeur de la succession.
Est-ce le testateur peut agir de mauvaise foi pour obtenir des faveurs et des services en échange de promesses d’un héritage?
Puisque la liberté de tester est absolue en droit québécois, le testateur est toujours en mesure de modifier son testament à sa guise, sans être lié par les promesses qu’il aurait faites. Cependant, il ne faut pas qu’une telle situation corresponde à un abus. La succession d’un défunt qui a obtenu des services en promettant en échange un héritage pourrait être tenue au paiement de dommages et intérêts.
Par exemple, dans une affaire similaire, le tribunal a accordé des dommages intérêts à un fils qui a fourni des services à sa mère lors des derniers mois de sa vie, en se faisant promettre qu’il aurait une part de son héritage. Le montant des dommages et intérêts accordés au fils correspondait à environ 20% de la valeur totale de la succession.
Ainsi, la personne qui a fourni des services en croyant qu’elle serait récompensée par un héritage peut exercer un recours en enrichissement injustifié en vertu de l’article 1493 C.c.Q.
Est-ce que le testateur peut nier des droits prévus au patrimoine familial, à son régime matrimonial ou à son contrat de mariage?
La réponse est non, parce que le défunt n’est pas en mesure de léguer plus que ce qu’il a. Comme les droits du conjoint dans le patrimoine familial, le régime matrimonial et le contrat de mariage sont exclus de la succession du défunt, le défunt ne peut pas faire fi des droits prévus par ces institutions afin de léguer certains biens. S’il n’existe pas une entente entre le conjoint et le liquidateur de la succession c’est le tribunal qui va déterminer.
Par exemple, imaginons que le défunt est le seul propriétaire de la résidence familiale d’une valeur nette de 300 000$. Le conjoint pourra dès lors réclamer 150 000$ de la succession en vertu de ses droits dans le patrimoine familial et ce, même s’il a été déshérité. En plus de cela, puisqu’il s’agit de la résidence familiale, le conjoint peut même, en vertu de l’article 856 C.c.Q., exiger que la propriété de la résidence lui soit transférée en échange du paiement du solde de sa valeur à la succession.
Dans un cas contraire, supposons que la résidence appartient au conjoint survivant. La succession pourra alors exercer une réclamation contre le conjoint afin d’obtenir la moitié de la valeur de la résidence.
Est-ce que le testateur peut léguer des biens accumulés grâce à l’apport d’une autre personne au cours de sa vie?
Malgré le fait que la liberté de tester est absolue, nul ne peut s’enrichir au détriment d’autrui. Ainsi, si les biens du défunt ont été obtenus grâce à l’apport en bien ou en services d’un conjoint de fait, celui-ci pourra exercer un recours en enrichissement injustifié en vertu des articles 1493 ss. C.c.Q.
Il est important de noter que lorsque le défunt meurt sans testament, le conjoint de fait n’a aucune part prévue selon les règles de la dévolution légale, contrairement au conjoint marié ou uni civilement. Ainsi, le recours en enrichissement injustifié peut être d’une grande utilité pour le conjoint de fait!
Est-ce que le testateur peut léguer ses biens à l’infirmière qui s’est occupée de lui dans les derniers mois de sa vie?
L’art. 761 C.c.Q. prévoit que si l’infirmière travaillait au sein de l’établissement de santé dans lequel le testateur recevait des soins, le testament rédigé en sa faveur est nul.
Si le testament est le résultat d’une captation, il pourra également être déclaré nul par le tribunal. La captation correspond à l’usage de manœuvres répréhensibles et des influences indues pour amener une personne à lui consentir des libéralités. Dans leur analyse, les tribunaux vont tenir compte, entre autres, de l’âge du testateur, son niveau de santé, sa vulnérabilité, son contexte familial et social et le caractère raisonnable ou non des dispositions testamentaires contestées.
Attention, un testament pourrait également être déclaré nul s’il résulte de l’incapacité du testateur. Il faut cependant noter que la captation et la capacité à tester sont deux notions distinctes en droit successoral.
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En somme, si vous êtes le proche d’un défunt qui vous a déshérité par l’entremise de son testament, il est possible que certains recours s’ouvrent à vous selon votre situation. Par exemple, si vous bénéficiez d’une pension alimentaire, vos droits ne disparaissent avec le décès du débiteur alimentaire, vous pouvez intenter une réclamation alimentaire à l’encontre de la succession! Il en va de même si vous avez fourni des services à un testateur de mauvaise foi, qui vous avait promis un héritage en échange de vos services, ou si vous êtes un conjoint de fait qui a contribué à l’accumulation des biens du défunt. Vous pouvez bénéficier dès lors du recours en enrichissement injustifié.
Bien évidemment, l’exercice de ces recours implique nécessairement un processus judiciaire devant le tribunal. C’est ici qu’entre en jeu l’avocat en droit successoral : ce professionnel du droit des successions peut vous aider dans la constitution de votre dossier pour les recours présentés ci-haut et défendre vos intérêts devant le tribunal!
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