Imaginons qu’un potentiel héritier commette un acte particulièrement grave, pourrait-il quand même être appelé à hériter des biens du défunt?
La réponse à cette question se trouve dans les règles relatives à l’indignité successorale. Au Québec, il est possible qu’un héritier soit sanctionné d’indignité, c’est-à-dire qu’il soit écarté d’une succession à laquelle il aurait normalement été appelé. L’indignité successorale peut être le résultat de la loi ou du testament, pour certains motifs graves ayant trait au défunt.
Dans le Code civil du Québec, les causes de l’indignité successorales sont prévues aux articles 620 et 621 C.c.Q. Ces règles concernent l’exclusion d’un héritier de la succession du défunt, soit par le testament ou par la loi.
Il importe donc de distinguer entre deux catégories : les causes d’indignité successorale « de plein droit » et les causes d’indignité successorale « sur déclaration », dans le cadre desquelles un tribunal saisi d’une demande de déclaration d’indignité reconnait qu’une personne est indigne de succéder.
JuriGo vous explique alors les différentes causes de l’indignité successorale testamentaire et légale en droit québécois!
L’indignité successorale de plein droit
L’indignité de plein droit implique le fait que cette personne ne peut, en aucun cas, hériter de la succession du défunt. Il n’est donc pas nécessaire que ce soit le tribunal qui déclare que cette personne est indigne, puisque la loi prévoit déjà qu’elle l’est de plein droit.
C’est l’article 620 C.c.Q. qui prévoit que certaines catégories de personnes sont indignes de plein droit de succéder :
- La personne qui est déclarée coupable d’avoir attenté à la vie du défunt; ou
- La personne qui est déchue de l’autorité parentale sur son enfant, avec dispense pour celui-ci de l’obligation alimentaire , à l’égard de la succession de cet enfant.
1. La personne déclarée coupable d’avoir attenté à la vie du défunt
Il s’agit du scénario qui peut sembler le plus évident en matière d’indignité successorale. En général, il suffira de déposer une copie de jugement de culpabilité de l’héritier ayant attenté à la vie du défunt. Cet héritier doit avoir été reconnu coupable d’une infraction criminelle, mais pas n’importe quelle infraction : il faut qu’il ait intentionnellement attenté à la vie du défunt.
Plusieurs exemples peuvent être cités, tels que la tentative de meurtre, le meurtre et la complicité pour meurtre. L’homicide involontaire peut également faire partie de ces infractions, s’il est possible de démontrer que l’héritier en question avait l’intention d’attenter à la vie du défunt. Cependant, il y a eu des cas dans la jurisprudence où un héritier qui a commis un acte par lequel il a attenté à la vie du défunt, sans nécessairement avoir l’intention de le faire, a tout de même été déclaré indigne de succéder.
Toutefois, il faut noter qu’une personne déclarée non criminellement responsable pour cause de troubles mentaux ne sera pas reconnue indigne de succéder, à moins qu’elle ait fait une déclaration de culpabilité.
2. La personne déchue de l’autorité parentale sur son enfant, avec dispense pour celui-ci de l’obligation alimentaire, à l’égard de la succession de cet enfant
Afin que cette cause d’indignité de plein droit soit mise en œuvre, il faudra déposer le jugement déclarant la déchéance du parent qui se doit d’être reconnu indigne de succéder. Ainsi, afin de satisfaire à cette cause d’indignité, il faut qu’il existe un jugement déclarant la déchéance de l’autorité parentale, avec dispense pour l’enfant de l’obligation alimentaire. Cette cause d’indignité s’opère donc lorsque le défunt prédécède son parent déchu et que ce dernier n’était pas tenu au paiement d’une pension alimentaire.
L’indignité successorale sur déclaration
L’article 621 C.c.Q., pour sa part, a trait à l’indignité successorale sur déclaration. Ainsi, cet article prévoit que peut être déclaré indigne de succéder :
- La personne qui a exercé des sévices sur le défunt ou a eu autrement envers lui un comportement hautement répréhensible;
- La personne qui a recelé, altéré ou détruit de mauvaise foi le testament du défunt; ou
- La personne qui a gêné le testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament.
1. La personne qui a exercé des sévices sur le défunt ou a eu autrement envers lui un comportement hautement répréhensible
La notion de « comportement hautement répréhensible » n’est pas définie dans le Code civil du Québec, ce qui en fait une notion assez large et ouverte à l’interprétation. Cette disposition est généralement interprétée largement afin d’inclure les gestes malveillants posés à l’égard d’un héritier, sans que ces gestes ne soient nécessairement des infractions criminelles.
De plus, la commission d’un « comportement hautement répréhensible » suffit pour présenter une cause d’indignité sur déclaration, il n’y a donc pas de critère d’intention comme pour l’indignité de plein droit. Cependant, la jurisprudence et la doctrine semblent indiquer que l’intention de l’héritier d’un tel comportement devrait être considérée comme un facteur subjectif par le tribunal. Dans son analyse de la déclaration d’indignité, le tribunal tient également compte d’un nombre de critères objectifs, tels que la gravité du comportement.
2. La personne qui a recelé, altéré ou détruit de mauvaise foi le testament du défunt
L’indignité sur déclaration vise entre autres la personne qui a altéré le testament du défunt. Attention, dans le cas de l’altération du testament, il faut que cette altération soit suffisamment majeure : elle doit impliquer une modification substantielle du testament visant à le fausser afin de porter préjudice à autrui.
Le recel, quant à lui, vise spécifiquement le testament lui-même, et non un bien de la succession. Le recel peut s’observer, par exemple, à travers la dissimulation illégale du testament du défunt ou par la confection d’un faux testament. Le recel a généralement l’objectif d’accorder une plus grande part ou bien l’entièreté de la succession du défunt au fautif, alors que cela est contraire aux volontés du défunt.
3. La personne qui a gêné le testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament
La gêne d’un testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament est une notion qui implique généralement l’usage de manœuvres dolosives par l’héritier visé par l’indignité. Par exemple, cet héritier peut avoir proféré des menaces à l’égard du testateur ou avoir employé une pression indue à son égard.
L’héritier qui a gêné le testateur peut quand même être reconnu indigne sur déclaration, même si ses manœuvres dolosives n’ont pas mené aux résultats visés (comme la modification du testament). Autrement dit, l’échec d’une tentative de l’héritier de gêner le testateur dans la rédaction, la modification ou la révocation de son testament peut également constituer une cause d’indignité sur déclaration suffisante.
Existe-t-il une exception à l’indignité successorale?
Il est important de noter que l’article 622 C.c.Q. vient préciser qu’un héritier n’est pas indigne de succéder, et ne peut pas être déclaré indigne, si le défunt connaissait la cause d’indignité et l’a tout de même avantagé ou n’a pas modifié son testament alors qu’il aurait pu le faire. Ainsi, la loi reconnait que le défunt peut « pardonner » la cause de l’indignité .
Il faut néanmoins que le défunt ait eu la capacité et l’habileté d’accorder un pardon conforme à l’article 622 C..c.Q. à l’héritier au moment où il aurait pu le faire. Afin d’appliquer cette exemption d’indignité, le tribunal va donc tenir compte du fait que le défunt était en pleine possession de ses aptitudes et qu’il était conscient au moment des faits allégués jusqu’à son décès.
Qui peut présenter une demande de déclaration d’indignité d’un héritier et quelles sont les modalités d’une telle demande ?
Tout successible ou toute personne qui aurait vocation à hériter, si la déclaration d’indignité était prononcée, peut demander au tribunal de déclarer l’indignité d’un héritier lorsque celui-ci n’est pas indigne de plein droit, conformément à l’article 623 C.c.Q. Cette demande doit être faite dans un délai d’un an suivant l’ouverture de la succession ou bien la connaissance de la cause de l’indignité.
La détermination du point de départ de ce délai d’un an est une question de fait qui est analysée selon les circonstances spécifiques à chaque cas. Cependant, il est généralement admis que le moment correspondant au point de départ du délai n’est pas le moment où un successible aura de simples soupçons liés au comportement justifiant l’indignité, mais bien le moment où le successible prend connaissance de ce comportement sur la base d’éléments de preuve tangibles. Ce délai d’un an constitue un délai de déchéance et non un délai de prescription, ce qui implique qu’il ne peut être suspendu ou interrompu.
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Vous soupçonnez qu’un des héritiers de la succession a commis un acte répréhensible ou a employé des manœuvres dolosives à l’égard du défunt? Vous n’êtes pas sans recours : la demande de déclaration d’indignité existe justement pour cela.
Lorsque tous les critères sont réunis et que vous êtes un successible ou que vous auriez vocation à hériter suite à une telle déclaration, vous pouvez demander au tribunal de déclarer que l’héritier en question est indigne, ce qui aura pour effet de l’écarter de la succession. Pour maximiser vos chances de réussite dans un tel recours, vous aurez certainement besoin de l’aide d’un avocat spécialisé en droit successoral ! Ce juriste chevronné peut vous aider à mettre en place un dossier solide pour assurer que le tribunal accueille votre demande.
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